Ishikawa Takuboku (1886-1912) - Ceux que l'on oublie difficilement
Les textes ci-dessous sont extraits de 一握の砂 Ichiaku no suna (Une poignée de sable), son premier grand recueil, dont 忘れ難き人々 Wasuregataki hitobito (ceux que l’on oublie difficilement) est la quatrième partie(éditions Arfuyen). Beaucoup de nostalgie...
忘れ難き人々 Wasuregataki hitobito
J'ai compté les années d'espérance
et je fixe mes doigts
je suis fatigué du voyage
*
Une enseignante
sur les lunettes un reflet
si triste
*
Matin après matin mon réveil
joue une ritournelle chinoise que j'aime bien
quelle pitié
*
Tellement amaigri
ton corps ne semble plus
qu'un bloc de révolte
*
La glace scintillante
un pluvier chante
- lune d'hiver sur la mer de Kushito
*
Au-dessus du feu
une bouteille d'encre gelée
des larmes coulent sur al braise
*
Le rire d'une femme
tout à coup me transperça
une nuit de saké froid dans la cuisine
*
Triste
l'empreinte de ce baiser
joyau blanc sur le bras
*
Dans la baie sans vagues en février
peint de blanc
un navire étranger s'avançait doucement
*
Dans un vieux carnet rouge
restent écrits
le lieu et l'heure de notre rencontre
*
Une pensée
semblable au sentiment
de socquettes sales qu'on remet
*
Cette femme qui pleurait dans ma chambre
était-elle souvenir d'un roman
ou de l'un de mes jours
*
Ces sombres prunelles
qui du monde ne buvaient que clarté
je les revois encore
*
Ces paroles précieuses
que je n'ai jamais dites
restent dans ma poitrine
*
Dans la rue une silhouette qui te ressemblait
et mon coeur s'est réjoui
Quelle tristesse à cette pensée
*
Une fois encore si j'entendais cette voix
totalement alors
ma poitrine s'allégerait
*
Parfois je pense à toi
tristesse de ce paisible coeur
qui soudain s'agite
*
Les années se sont amassées
depuis notre séparation
Combien tu m'es devenue chère