LE MOUTON
Nous étions tous accroupis regardant
un mouton immobile en train d’être tondu
les grandes cisailles par moments blessaient sa peau
« je lui passerai de la pommade » dit grand-père
sur la blessure il appliqua un baume rouge
grand-mère nous annonça
« ce seront vos chaussettes »
bientôt
les fibres grossières devinrent
pelote brillante et rebondie
elle nous tricota des chaussettes
des chandails aussi
par-ci par-là des brins de paille y étaient mêlés
nous interrompions nos jeux
pour ôter la paille de nos chaussettes
grand-mère en retirait aussi de notre dos
« la laine n’est pas peignée il en reste encore »
cela ne nous grattait pas mais nous allions trouver grand-mère
elle nous caressait le dos et nous courions dans la neige
les moutons qu’elle caressait aussi couraient avec nous
poème extrait de La terre – Une âme qui joue (VI)