Santoka, Zen à pas comptés (2)
Santoka, dans son journal de la mendicité (1930) écrit :
« S’il y a une montagne, je regarde la montagne.
s'il pleut, j’écoute la pluie.
Printemps, été, automne, hiver,
demain sera bon et
hier soir était bon aussi ».
山あれば山を観る yama areba yama o miru
雨の日は雨を聴く ame no hi wa ame o kiku
春夏秋冬 haru natsu aki fuyu
あしたもよろし ashita mo yoroshi
ゆふべもよろし yûbe mo yoroshi
Il écrit un peu plus tard.
« Je me sens solitaire le jour où je ne marche pas.
Je me sens solitaire le jour où je ne bois pas.
Je me sens solitaire le jour où je n'écris pas de poème.
Je ne me sens pas solitaire même si je marche seul,
même si je bois seul, même si j'écris seul un poème. »
歩かない日はさみしい、 arukanai hi wa samishii
飲まない日はさみしい、nomanai hi wa samishii
作らない日はさみしい、tsukaranai hi wa samishii
ひとりでいることはさみしいけれど hitoride iru koto wa samishii keredo,
ひとりで歩き、ひとりで飲み、ひとりで作って hitoride aruki, hitoride nomi, hitoride tsukutte
いることはさみしくな iru koto wa samishikunai.
Ses haïkus sont de forme libre et orale, il utilise souvent le temps passé, contrairement aux classiques, qui, lorsqu'ils utilisent un verbe, l'écrivent au temps présent.
Concis, en peu de mots, il dit l'essentiel d'une manière narrative, une belle poésie minimaliste.
へうへうとして 水を味ふ
heu heu toshite mizu o ajiwau
tout en chancelant
je goûte l'eau
*
ぬれててふてふどこへゆく
nurete tefutefu doko e yuku
le papillon mouillé
où va-t-il ?
*
酔うてこほろぎと寝てゐたよ
youte jôrogi to nete itayo
saoul
j'ai dormi avec un grillon
*
かなかなないてひとりである
kanakana naite hitori de aru
quand la cigale chante
je me sens seul
*
つかれた脚へとんぼがとまった
tsukareta hashi e tonbo ga tomatta
sur ma jambe fatiguée
une libellule
*
鉄鉢の中へも霰
teppachi no naka e mo arare
même dans mon bol
il grêle
*
分け入れば水音
wakeireba mizu oto
j'avance plus loin
le bruit de l'eau
*
秋風の石を拾う
akikaze no ishi o hirou
vent d'automne
je ramasse une pierre
*
笠も漏りだしたか
kasa mo moridashitaka
même mon chapeau
commence à filtrer
*
私にあつては、生きるとは句作することである、句作即生活だ。
watashi ni atte wa, ikiru to wa kusaku suru koto de aru, kusaku sunawachi seikatsu da.
Pour moi, vivre c'est composer des haïkus. Faire un haïku c'est également la vie.
vocabulaire spécifique
kasa = chapeau de paille du moine
teppachi = bol en fer du moine mendiant
kanakana = cri de la cigale.
jôrogi = grillon
tefutefu = papillon
Extraits de Santoka, Zen à pas comptés (Éditions Arichi, 2008).