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CHICHINPUIPUI
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27 mars 2007

Sugita Hisajo et la nature

pueraire_kudzu会いよりて 葛の雨聞く 傘触れ

aiyorite / kuzu no ame kiku / kasa fureshi

en se rapprochant
pour écouter la pluie sur la vigne* -
nos parapluies se touchent

* kuzu = puéraire, ou kudzu, ou vigne kudzu (pueraria lobata), arrow root en anglais, est une plante vivace de la famille des Fabacées originaire d'Extrême-Orient. Pueraria, fait référence à l'exceptionnelle vitalité de ces plantes envahissantes. La puéraire fleurit en automne, ses fleurs sont doucement parfumées. Sa racine est utilisée dans la cuisine asiatique comme épaississant. Le kuzukiri. est un dessert très connu. Elle a également de nombreuses vertus médicinales.



higanbana11我につきいし サタンはなれぬ 曼珠沙華

ware ni tsuki ishi
Satan hanarenu
manjushage*

Satan me poursuit
et ne me quitte pas-
amaryllis en touffe

* manjushage : nom littéraire (Cluster amaryllis), la fleur aux 600 noms ou higanbana : fleur d'équinoxe (彼岸花), est la fleur des Japonais et des poètes. Fidèlement, à l'équinoxe d'automne, jaillissent de terre, sur de hautes hampes, ses fleurs de flammèches rouges. Sa floraison en masse, le long des fossés d'irrigation, strie les paysages des rizières de zébrures sanglantes. La magie de la fleur et celle des traditions font le succès de bien des haïkus et des estampes.

Higan : fête bouddhiste de 7 jours ayant lieu à chaque équinoxe, consacrée à la mémoire des morts et à l'entretien des tombes. La fleur apparaît pendant l'higan d'automne, d'où ce nom et quelques autres :
shibito bana : fleur des morts
tengai bana : fleur de l'au-delà
yûri bana : fleur des fantômes
sugeto bana : fleur orpheline

Magnolia_grandiflora

長い雨や 泰山木の花落ず

naga ame ya
taisanboku* no
hana ochizu

pluie persistante-
les fleurs du magnolia
ne sont pas encore tombées

* taisanboku (泰山木) : magnolia grandiflora fleurit en été.


cerisier桜咲く憂さの暮れ橋うち渡り

sakura saku / usa no kurehashi / uchiwatari

cerisiers en fleurs-
sur le vieux pont
je traverse mélancolique



bourgeons土濡れて 久女の庭に 芽ぐむ物

tsuchi nurete / Hisajo no niwa ni / megumumono

sol détrempé-
dans le jardin d'Hisajo
tous ces bourgeons !



asagao28

朝顔や 濁り初めたる 市の空

asagao* ya / nigori hajimetaru / ichi no sora

belles de jour-
le ciel au-dessus du marché
devient nuageux

*

夕顔や ひらきかかりて 襞深く

yûgao* ya / hiraki kakari te / hida fukaku

le volubilis
juste entr'ouvert
profondément froissé

* asagao : belles de jour, littéralement visage du matin et yûgao, visage du soir : volubilis (ipomea). Ce sont des fleurs très prisées au Japon.

rosejaune薔薇香るまあぶるのひに哀詩あり

bara kaoru / maaburu no hi ni / aishi ari

parfum de roses
une élégie gravée
dans le marbre

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24 mars 2007

Sugita Hisajo (1890-1946)

Hisajo s'est appliqué, sa vie durant, à l'art de la calligraphie et du haiku. Innovatrice dans le monde du haïku, féministe avant l'heure, elle nous révèle sa coquetterie, voire sa sensualité dans le port du kimono. Malheureusement atteinte de démence vers la fin de sa vie, Hisajo est morte sans être acceptée dans le monde du haïku. Ses œuvres sont considérées comme étant l’une des sources du haïku contemporain.

Micheline Beaudry lui consacre un article, ainsi qu'aux autres femmes poètes japonaises dans la revue canadienne Arcade n°64, dont le thème est l'instant - automne 2005. Je la remercie de m'avoir fait connaître et la revue et les haijins féminines. On ne trouve que très peu de traductions françaises. Je me suis donc inspirée des traductions anglaises de World Haiku Review pour interpréter ces haïkus.

春の陽に
心踊りて
襟掛けぬ
haru no hi ni / kokoro odorite / eri kakenu

lumière de printemps-
mon cœur danse en mettant
le col de mon kimono

Mais le port du kimono n'est pas toujours un plaisir, lorsque la ceinture (obi) rigide devient une gêne.

板の如き
帯に刺されぬ
秋おぎ
ita no gotoki / obi ni sasarenu / aki ogi

enfoncé dans l'obi
trop serré et rigide
un éventail d'automne [trad. M. Beaudry]

*

花衣
脱ぐやまつはる
紐いろいろ
hanagoromo / nuguya matsuharu / himo iroiro

kimono fleuri-
en se déshabillant s’accrochent
les différents cordons

*

薄物に
衣通る月の
肌へかな
usumono ni / so tôru tsuki no / hadae kana

à travers le kimono léger
la lune effleure la peau nue

Gestes d'une femme se lavant les cheveux.

菊の日に
雫振り梳く
濡毛かな
kiku no hi ni / shizuku furi suku / nurege kana

jour des chrysanthèmes-
en peignant mes cheveux mouillés
une pluie de gouttes

Sa compassion s'adresse aussi bien aux êtres humains qu'aux fleurs.

秋宮に
髪むしり泣く
女哉
aki miya ni / kami mushiri naku / onna kana

temple en automne -
tirant violemment ses cheveux
une femme pleure

*

貧しき群れに
落ちし心や
百合にはず
mazushiki mureni / ochishi kokoro ya / yurini hazu

dans l'horrible foule
mon coeur s'est brisé
à la vue des lys innocents

Japonaise catholique ?

バイブルを
良む淋しさよ
花の雨
baiburu o / yomu sabishisa yo / hana no ame

lisant la bible
seule-
pluie de pétales

*

雪道や
降誕際の
窓明り
yuki michi ya / kôtansai no / mado akari

fenêtre éclairée
sur le sentier neigeux
fête de la nativité*

* plutôt que de traduire "soir de Noël", j'ai préféré la traduction littérale plus proche du sens.

Un peu de légèreté aussi dans ses désirs de femme.

秋木ぬと
サファイア色の
小鯵買う
aki kinu to / safaia iro no / koaji kau

l'automne est là-
j'achète
un petit poisson saphir

Hisajo mère :

朝寒の
釜たくわれに
起き来る子
asazamu no / kama taku ware ni / oki kuru ko

matin de froid-
tandis que j'allume le feu
l'enfant réveillé me rejoint

Adaptation française de neko.

13 mars 2007

Eclipse de lune vue par Issa

人数は
月より先へ
欠けにけり

hitokazu wa / tsuki yori saki e / kakenikeri

bon nombre de gens
avant que la lune l'ai fait
se sont éclipsés*

* Exemple typique de jeu de mots à la manière de l'école Danrin. Issa regarde une éclipse totale de lune, entre dix heures et trois heures du matin, selon la note dont il fait précéder le poème, et les curieux lassés par l'attente disparaissent (kakenikeri) l'un après l'autre avant que la lune soit complètement éclipsée (kakenikeri). [Kobayashi Issa, En village de miséreux - Gallimard 1996]

Il semblerait que nous ayons le même jeu de mots en français.

10 mars 2007

Sumire

Voilà je me lance. Mon premier et peut-être dernier haïku en japonais. La violette m'a inspirée et m'inspire toujours (Cf. sumire).

思い出し
スミレの色香
夢見哉

omoidashi / sumire no iroka / yumemi kana

la violette, je me souviens
de sa couleur de son parfum-
était-ce un rêve

9 mars 2007

MIYABI : splendeur et sérénité

A l’occasion de la Journée internationale de la femme 国際女性デー (kokusai josei de-), le Japon a organisé une soirée à l’UNESCO sur le thème : MIYABI - splendeur et sérénité.

Au programme :

-          Cérémonie de l’habillage : Jûni-hitoe 十二単 (12 couches)

-          Témoignage du maître du Théâtre Nô, Noriko Tomiyama.

habit_detail3

Le Jûni-hitoe est le costume des Dames de la Cour impériale au xie siècle, époque Héian, toujours en usage dans la Maison impériale, porté à l’occasion des cérémonies de la cour à très haut protocole. Il est composé d’une superposition de kimonos dont les étoffes, les couleurs et les motifs rivalisent de somptuosité et de délicatesse par le jeu des matières, des tissages et des incrustations et broderies. Le style du Jûni-hitoe est resté inchangé depuis mille ans.

Deux assesseurs, dont Reiko Shoji, présidente de l’école Takakura de Emondo, pour habiller le sujet impassible, car il existe une école pour apprendre à habiller les autres. Au Japon tout est érigé en art.

Les kimonos, tous plus colorés les uns que les autres, s’ajoutent en couches successives (traditionnellement 12, mais je n'ai pas compté) sur la mannequin vivante (l’est-elle ?). Les deux femmes qui s’occupent d’elle, nouent les cordons de la ceinture et arrangent les plis pour former une suite harmonieuse de couleurs. Une belle cérémonie, pleine d’élégance, mais qui magnifie la femme-objet, femme désincarnée.

no2Théâtre Nô. En revanche, pour la journée de la femme, c’est lui rendre hommage que de l’accepter dans le théâtre traditionnel Nô, réservé aux hommes. Car chacun sait que les rôles féminins étaient tenus par des hommes (女形onnagata). Le témoignage de Noriko Tomiyama, 80 ans, montre les efforts intenses qu’il a fallu pour faire connaître le monde féminin. Ce fut une surprise pour moi de voir que les choses évoluent au Japon dans ce domaine, ce qui n’a pas du être sans mal. De plus, insigne suprême, elle a été classée « Trésor National Spirituel » depuis 2004. A la différence des hommes, Noriko joue à visage découvert, ce qui est une innovation. Le masque est l’apanage des hommes.

Représentée par son élève, un bout de Hagoromo (羽衣 habit en ailes d’ange), la pièce la plus connue au Japon. De circonstance après l’habillage que certains auraient voulu un déshabillage.

Soirée intéressante !

Quelques photos en plus.

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7 mars 2007

HOSAI (1885-1926)

針に糸を
通しあへず
青空を見る

hari ni ito o / tôshi aezu / aosora o miru

impossible d'enfiler
le fil dans l'aiguille
je contemple le ciel bleu

Sur le même thème : le chas trop petit

2 mars 2007

Jean-Claude Cesar seul au jardin

Voilà, les éditions du Mûrier Blanc viennent de m'envoyer le livre de Jean-Claude, dont je me suis délectée à petit pas en le suivant dans son jardin et en me familiarisant avec l'univers qui le compose. Des animaux, des objets, le climat, les fleurs et le jardinier sont les thèmes abordés. Beaucoup de fraîcheur.

Amie des grenouilles, j'aime

après la pluie
les petites grenouilles vertes
grimpent dans les papyrus

*

un paon fait la roue
devant une brouette
chaleur précoce

Avec sa permission, je reproduis une photo qu'il a prise, pour illustrer

CHEVAL

loin de la mer
les chevaux dans la prairie
le cri des mouettes

Parmi les objets, ma préférence est

sur le billot de pin
saison après saison
le chandail bleu

Tout le mystère subsiste. A qui appartient-il ? Et puis

feux d'automne
les draps fraîchement lavés
piqués de cendres

fait penser au lessive d'autrefois à la cendre. Retour dans le passé.

Sous le climat pluvieux

pluie de mai
l'escargot sur sa coquille
transporte un pétale

et aussi pour illustrer la violette, fleur tendrement chérie

pluie glacée
les violettes les narcisses
les enfants en vacances

Le thème des fleurs abordé avec sensibilité :

le mûrier abattu hier
dans la force de l'âge
pleure encore

Le jardinier lui-même

mon repas frugal
dans la serre aux carreaux cassés
crachin d'automne

*
seul dans le jardin
sur le tapis de mousse
le silence de mes pas

Egalement grand gourmand, il croque les mots et les échange avec Christiane Romand dans son très appréciable Croque-mots, toujours aux éditions Mûrier Blanc (2004).

Merci Jean-Claude pour ces quelques moments de bonheur et de partage.

Seul au jardin, Mûrier Blanc éditions (2005) - 6 rue Foch 34000 Montpellier
ISBN DLE 20050310-11578
murier-blanc@orange.fr

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